I. Introduction 
La région carotidienne est la région située à la partie latérale du cou, au dessus de la région sus claviculaire, et en arrière de la région parotidienne et des 2 régions hyoïdiennes. 
Elle doit son nom aux artères carotides qui la traversent de bas en haut.
Elle est entièrement masquée par le muscle sterno-cléido-mastoïdien, véritable couvercle musculaire, et justifie son appellation de région « sterno-cléido-mastoïdienne ».
Son étude revêt plusieurs intérêts :
   Anatomiques :  – livre passage au paquet vasculo-nerveux à destination encéphalo-faciale +++
   Cliniques :   – Palpation du pouls carotidien.
                       – ADP accessibles à l’examen clinique
   Paracliniques : – artériographie, écho-doppler
   Pathologiques : -Vasculaires : plaies, athéromes, anévrysmes, thromboses
                            – Lymphatiques : ADP d’origines tuberculeuses, néoplasiques
                            – Nerveuses : paralysies du X, paralysies du XII

II.  Anatomie descriptive

A. Limites
Quadrilatère allongé, oblique en arrière et en haut, la région carotidienne est limitée :
   · en avant par le bord antérieur sterno-cléido-mastoïdien
   · en arrière par le bord postérieur de ce muscle
   · en haut, par une ligne horizontale allant de la mastoïde à l’angle de la mandibule
   · en bas, par la clavicule et la fourchette sternale
   · en profondeur, par la colonne cervicale de C3 à C7 (en arrière) et l’axe viscérale du cou (en dedans)
B. Constitution anatomique
La région carotidienne comprend 3 plans de couverture :
   · plan superficiel
   · plan moyen
   · plan profond
   1) Plan superficiel
– peau fine, glabre et mobile sur les plans sous-jacents, la peau de la région carotidienne se prête aux incisions esthétiques
– tissu cellulaire sous cutané : dense et serré au dessous de la mastoïde, il devient plus lâche en bas
– le platysma (muscle peaucier du cou) est innervé par le rameau du cou du nerf facial
– Entre le plan superficiel et le plan moyen chemine la veine jugulaire externe et les branches cutanées du plexus cervical
   2) Plan moyen
Formé par le muscle sterno-cléido-mastoïdien engainé dans la lame superficielle du fascia cervicale
C’est le muscle de couverture antero-latéral du cou ; épais, de forme quadrilatère, étendu de l’os occipital et du processus mastoïde, au sternum et à la clavicule.
    a) Composition :
Le muscle SCM est décomposable en 4 chefs disposés en 2 couches :
  – Couche profonde (1 chef) :
Cléido-mastoïdien : naît du 1/3 médial de la face supérieur de la clavicule, se termine sur la mastoïde, trajet presque vertical
  – Couche superficielle (3 chefs) :
   – En avant : 2 chefs sternaux (sterno-mastoïdien et sterno-occipital)
Naissent du sternum, ils ont un trajet oblique en haut, en arrière et latéralement, se terminent sur la mastoïde et sur la ligne nuchale supérieure de l’os occipital. Ces 2 chefs sont souvent confondus
   – En arrière : cléido-occipital : forme le bord postérieur du muscle
NC :
– la saillie du sterno-cléido-mastoïdien est visible lors de la rotation de la tête du côté opposé
– la position d’exploration clinique nécessite la flexion de la tête avec légère rotation du coté opposé : la saillie musculaire se relâche, et les doigts peuvent percevoir les pulsations carotidiennes
– la position opératoire d’incision, nécessite l’extension de la tête avec rotation de la face du coté opposé : le relief musculaire vient alors couvrir la gouttière et forme le repère essentiel de la découverte des vaisseaux.

   b) Vascularisation :
– en haut par une branche de l’occipitale ou de l’auriculaire postérieure
– au milieu par une branche de la thyroïdienne supérieure
– en bas par une branche de la thyroïdienne inférieure
   c) Innervation :
– motrice par : la branche externe du nerf accessoire (XI)
– sensitive par : une branche du plexus cervical profond (C2 – C3)
   d) Action :
– s’il prend son point fixe en bas, il fléchit la tête, l’incline de son coté avec rotation de la face du coté opposée
– si les deux muscles se contractent en même temps, ils fléchissent la tête en avant
– s’il prend son point fixe en haut, il est inspirateur accessoire
NC : le torticolis est une attitude vicieuse et douloureuse du cou, lié à une contracture acquise ou congénitale du muscle sterno-cléido-mastoïdien
   3) Plan profond
Uniquement au tiers inférieur de la région :
  – En arrière : le ventre postérieur du muscle omo-hyoïdien, oblique en haut, en avant et en dedans ; le tendon intermédiaire des 2 ventres du muscle se projette sur le paquet vasculo-nerveux du cou
  – En avant : la partie basse du muscle sterno-cléido-hyoïdien
  – Entre les 2 : l’aponévrose cervicale moyenne
III. Contenu
Au dessous des plans musculaires de couverture, se trouve un tissu cellulaire abondant, dans lequel circule le paquet vasculo-nerveux du cou, constitué par :
– L’artère carotide commune et ses branches de division
– La veine jugulaire interne
– Lymphocentres cervicaux profonds
– Les nerfs pneumogastriques et grand hypoglosse
A. L’artère carotide commune (ou carotide primitive)
D’un calibre de 8 mm, c’est la plus volumineuse des artères du cou, sa longueur moyenne est de 12 cm
  1) Origine :
– à droite : elle naît à la base du cou, de la bifurcation du tronc brachio-céphalique
– à gauche : elle naît directement de la crosse de l’aorte, et comporte avant sa portion cervicale, un trajet intra thoracique
  2) Trajet :
Visualisé par l’artériographie, il est d’abord oblique en haut, en dehors et en arrière puis devient vertical jusqu’à sa terminaison en 2 branches.
Au cours de son trajet, la carotide primitive ne donne aucune branche collatérale.
  3) Terminaison :
En regard du cartilage thyroïde en avant et C4 en arrière, l’artère carotide primitive se bifurque en 2 branches :
  – l’artère carotide interne est destinée au cerveau et à l’œil
  – l’artère carotide externe est destinée à la face et au cou
Cette bifurcation présente à sa face postérieure le corpuscule carotidien d’ARNOLD qui reçoit des filets sympathiques du plexus intercarotidien et des rameaux du glosso-pharyngien (IX) et du pneumogastrique (X) ; l’ensemble forme le sinus carotidien, zone réflexogène qui joue un rôle essentiel dans la régulation de la pression artérielle.
NC : la dissection de cette région doit être faite avec prudence afin de ne pas induire de brusques variations hémodynamiques.
B. Les branches de division :
Ne font partie de la région que dans leur 1ère portion
  1) Artère carotide interne :
Au dessus, après 10 à 12mm de son trajet, la carotide interne se dirige obliquement en haut et en dedans, croisant à angle très aigu la face postérieure de la carotide externe qui monte en haut et en dehors.
La carotide interne suit la même direction de la carotide primitive dans le creux parotidien postérieur, elle ne donne pas de collatérales.
  2) Artère carotide externe :
Elle est située en avant et médialement de l’artère carotide interne, puis elle monte verticalement sur une longueur de 1 à 2cm
Elle donne naissance à un groupe de collatérales. Elle se distingue ainsi de la carotide interne qui n’a pas de branches collatérales dans le cou.
Cette différence permet de la distinguer aisément lors de la réalisation d’une artériographie carotidienne.
Les branches collatérales de l’artère carotide externe sont de bas en haut :

  • la thyroïdienne supérieure : elle s’échappe très près de la bifurcation et se dirige en bas et en dedans, c’est au dessus d’elle sur un espace libre de 10 à 12 mm de long que se pratique habituellement la ligature de la carotide externe
  • la linguale
  • la faciale
  •  la pharyngienne ascendante
  •  l’occipitale
  • l’auriculaire postérieure
  •  les rameaux destinés au sterno-cléido-mastoïdien et la parotide.

NC : la découverte de la carotide externe se fait au niveau du triangle de FARABEUF, formé :

  • en haut par le ventre postérieur du digastrique et le nerf grand hypoglosse (XII)
  • en arrière par la veine jugulaire interne
  • en bas par le tronc veineux thyro-linguo-facial

Enfin, elle rejoint la loge parotidienne où elle se termine en se divisant en 2 branches :

  • l’artère maxillaire
  • l’artère temporale superficielle

C. La veine jugulaire interne
Satellite du système carotidien, la veine jugulaire interne est la principale et la plus volumineuse veine cervicale, d’un diamètre moyen de 15 mm avec 2 renflements :

  • – le golfe de la jugulaire à l’origine
  • – le sinus jugulaire à la terminaison

1) Origine :
Elle naît au niveau du foramen jugulaire (trou déchiré postérieur), en faisant suite au sinus sigmoïde (sinus latéral)
2) Trajet :
Elle descend obliquement en bas, en avant et en dedans en décrivant une longue spirale à la face latérale de l’arbre artérielle (carotide interne puis carotide primitive)
3) Terminaison :
En regard de l’extrémité médiale de la clavicule où elle s’unit à la veine sous-clavière, la jonction de ces 2 veines réalise le confluent de PIROGOFF d’où part le tronc veineux brachio-céphalique
4) Collatérales :
Dans la région sterno-cléido-mastoïdienne, la jugulaire interne reçoit de nombreux affluents :

  • tronc thyro-linguo-facial, formé par la réunion de la veine thyroïdienne supérieure, linguale, faciale et pharyngienne
  • la veine thyroïdienne moyenne (inconstante)

5) Anastomoses :
La veine jugulaire interne est richement anastomosée avec les autres systèmes de drainage veineux du cou.
NC : lors d’un évidement ganglionnaire cervical, les veines jugulaires internes peuvent être conservés lorsque les ADP ont un diamètre inférieur à 3 cm. Dans le cas contraire il faut sacrifier la jugulaire interne, si le sacrifice bilatéral des jugulaires internes s’impose, il convient de l’effectuer en 2 temps sous peine de voir se développer une stase veineuse intracrânienne parfois létale
D. Lymphocentre cervical profond latéral :
Situé dans la région sterno-cléido-mastoïdienne, il s’inscrit dans un triangle : « triangle de ROUVIERE »
Le sommet de ce triangle est situé en arrière de l’angle de la mandibule, il est occupé par les nœuds jugulo-digastriques (nœuds sous-digastriques). Le plus volumineux de ces nœuds est dit « ganglion de KÜTTNER »
A partir du sommet de ce triangle, 2 groupes de Lymphocentres d’individualisent :
Lymphocentre antérieur et Lymphocentre postérieur.
   – Lymphocentre antérieur :
Suit les vaisseaux jugulo-carotidiens, on le divise en 2parties par rapport au muscle omo-hyoïdien
Les nœuds jugulo-supra-omo-hyoïdiens drainant les Lymphocentres sub-mandibulaires, du larynx, hypopharynx et glande thyroïde
Les nœuds jugulo-infra-omo-hyoïdiens drainant la glande thyroïde
   – Lymphocentre postérieur :
Suit la branche externe du nerf accessoire (XI) dénommé en clinique « chaîne spinale »
Ce triangle est fermé en bas par le Lymphocentre inférieur qui suit l’artère transverse du cou : c’est la « chaîne cervicale transverse »
NC : ce triangle doit être enlevé en entier lors des curages ganglionnaires pratiqués dans le traitement des tumeurs malignes de la face et du cou
Les voies de drainage sont situées à la base du cou :
   – à droite : la grande veine lymphatique qui se jette dans la veine sub-Clavière
   – à gauche : le canal thoracique qui rejoint le confluent veineux de PIROGOFF
E. Le nerf pneumogastrique
Traverse la région avant de pénétrer dans le thorax, il chemine dans l’angle dièdre ouvert en arrière que forme la jugulaire interne latéralement et la carotide interne puis la carotide primitive médialement
Ses branches cervicales naissent au dessus et en dessous de la gouttière carotidienne.
F. Le nerf grand hypoglosse
N’apparaît que dans la partie supérieure de la région, au dessous du ventre postérieur du digastrique. Oblique en bas et en avant, il croise la carotide interne glissant entre le pneumogastrique en dedans et la jugulaire interne en dehors.
Au moment où il croise la carotide externe, il donne naissance à sa branche descendante, qui chemine à la face externe de la jugulaire jusqu’au tendon intermédiaire de l’omo-hyoïdien.
A ce niveau, il s’anastomose avec une branche du plexus cervical profond C2 – C3 pour former « l’anse de l’hypoglosse », d’où naissent les nerfs des muscles sous-hyoïdiens
IV. Rapports
A. Entre les éléments du paquet vasculo-nerveux
  1) Au niveau de la carotide primitive
– La veine jugulaire interne est l’élément le plus externe
– La carotide primitive en dedans
– Le nerf X dans l’angle dièdre formé par la veine et l’artère
– Une gaine vasculaire entoure ces trois éléments et envoie une cloison sagittale (le septum de LANGENBECK) entre la veine et l’artère, et qui se bifurque au contact du vague (X)
– Le muscle sterno-cléido-mastoïdien forme le couvercle musculaire, complété au tiers inférieur par le muscle omo-hyoïdien et l’aponévrose cervicale moyenne
NC : la découverte de la carotide primitive se pratique au dessus de l’omo-hyoïdien en passant dans la gaine du SCM et en réclinant la jugulaire interne en arrière
  2) Au niveau de la bifurcation carotidienne
– La veine jugulaire interne est toujours en dehors de la carotide interne
– La carotide externe quittant progressivement la veine, se rapproche de la grande corne de l’os hyoïde et donne ses premières collatérales
B. Avec les régions adjacentes
   – En arrière :
La région pré-vertébrale, avec ses éléments nerveux (branches profondes du plexus cervical, chaîne du sympathique cervical) et ses éléments vasculaires (artères et veines vertébrales)
Dans sa portion transversale, la thyroïdienne inférieure passe entre la carotide primitive et les vaisseaux vertébraux
   – En dedans :
L’axe aérodigestif du cou, avec :
    – En haut, le larynx et le pharynx et le nerf laryngé supérieur plaqué contre le pharynx
    – en bas la trachée et l’œsophage et le nerf laryngé récurrent montant le long de l’œsophage à droite et dans la gouttière trachéo-oesophagienne à gauche
  – En avant
– Au dessous de l’os hyoïde : les muscles sous-hyoïdiens et le corps thyroïde
– Au dessus de l’os hyoïde : la région sus-hyoïdienne latérale et la glande sous-maxillaire
  – En haut
La région parotidienne en avant que traverse la carotide externe, et l’espace sous parotidien postérieur en arrière où s’engage la carotide interne
  – En bas
Le médiastin en dedans et le creux sus-claviculaire en dehors
NC : ces rapports expliquent la diffusion facile vers le bas des collections liquidiennes développées dans la région carotidienne
V. Voies d’abord :
– incision oblique : pré-SCM, dégage la jugulaire interne et la carotide primitive avec sa bifurcation
– incision longitudinale : entre le chef sternale et le chef claviculaire du SCM
VI. Conclusion
La région SCM est une région qui a un intérêt anatomo-chirurgicale dû à l’importance du paquet vasculo-nerveux qui la traverse et qui est destinée à l’irrigation cervico-faciale et céphalique.
De ce fait, toute plaie au niveau de cette région constitue une urgence vitale nécessitant une exploration chirurgicale immédiate