1. Définition  :  la dyspnée, c’est la difficulté ou gêne à respirer : la respiration devient d’une part consciente et volontaire et d’autre part pénible. Elle doit être essentiellement différenciée de l’hyperventilation qui est une augmentation de l’amplitude respiratoire ne s’accompagnant pas de gêne respiratoire et qui se voit dans les  fausses dyspnées d’origine métabolique sans atteinte respiratoire .
2. Rappel physiologique de la respiration :
La  respiration normale est automatique, donc involontaire et inconsciente , elle comprend deux temps :
– L’inspiration: est le temps actif, elle est possible grâce à la contraction du diaphragme muscle inspiratoire, elle s’accompagne d’une augmentation de volume de la cage thoracique rendant possible la pénétration de l’air.   Les muscles accessoires de l’inspiration (sterno-cléido-mastoïdiens, scalènes, grand dorsal, grand pectoral) n’interviennent pas ou très peu lors de la respiration normale au repos: ils se contractent lors de l’effort ou dans  les gênes pathologiques affectant l’inspiration.
– L’expiration  : est le temps passif, grâce à l’élasticité pulmonaire la cage thoracique reprend sa position initiale ce qui rend possible la sortie de l’air.  Normalement, le temps expiratoire est plus long que le temps inspiratoire. Les muscles expiratoires (petit et grand oblique, petit dentelé inférieur et transverse) ne seront mis enjeu que dans les gênes pathologiques affectant l ‘expiration.
La  respiration est un acte réflexe qui comprend :
–  Des  voies centripètes  :  comprenant des fibres d’origine corticale, des fibres d’origine pulmonaire et des fibres d’origine sino-carotidienne, les deux dernières cheminant dans le tronc du pneumogastrique.
–  Un centre respiratoire : bulbaire situé dans le plancher du ventricule. Ce centre est excité directement par la  pression partielle de gaz carbonique et le pH sanguin et indirectement par l’intermédiaire des fibres centripètes d’origine sino-carotidienne  par l’hypoxie (baisse de la pression partielle d’oxygène).
– Des fibres centrifuges : la principale est le nerf phrénique qui innerve le diaphragme . Le mécanisme de la respiration est le suivant : l’inspiration appelle l’expiration, c’est le réflexe de Héring-Breuer : au cours de l’inspiration les fibres d’origine pulmonaire sont excitées par la distension  du  poumon, elles envoient un influx inhibiteur au centre respiratoire qui suspend son activité rendant ainsi possible l’expiration; au cours de l’expiration le centre ne reçoit plus cet influx inhibiteur, il reprend son activité et excite le nerf phrénique d’où inspiration.
La fréquence respiratoire : nombre de mouvements respiratoires par minute varie avec l’âge du sujet, au repos elle est de  :
— 14 à 22 mouvements/minute chez l ‘adulte;
—  22  à  30  mouvements/minute chez l’enfant. File varie et augmente normalement à l’effort et en altitude.

3. Analyse sémiologique de la dyspnée :
La dyspnée, qui est une perception consciente d’une gêne respiratoire, est donc bien un signe subjectif ou fonctionnel. Elle sera donc analysée par un interrogatoire soigneux comportant : la date de début, le mode de   début : brutal ou progressif, les circonstances d’apparition : le caractère spontané ou provoqué (effort,  fumée, saison), l’évolution dans le temps : permanente ou paroxystique (évolution par accès ou crises durant de quelques minutes à quelques heures), l’horaire dans le nycthémère (diurne ou nocturne),  l’existence de signes accompagnateurs : toux  , expectoration…
La  dyspnée signe fonctionnel s’accompagne toujours de modifications objectives de la respiration portant sur la fréquence, l’amplitude et la durée des deux temps de la respiration  ; ces modifications seront analysées lors de l’inspection, premier temps de l’examen clinique de l’appareil respiratoire.
  4. Les différents types de dyspnée :
Au  terme de l’interrogatoire et de l’inspection du malade plusieurs types de dyspnée peuvent être individualisés.
* Selon le mode de début :
    – Dyspnée aiguë : début brutal la dyspnée est d’emblée à son maximum.
    – Dyspnée chronique : début progressif le plus souvent.
* Selon les circonstances d’apparition :
     –  la   dyspnée  d’effort : c’est une dyspnée chronique induite par des efforts très limités et
courants, qui se prolonge au-delà de la durée normale (plus de 5 minutes) après la cessation de l’effort et qui va en augmentant dans le temps pour des efforts de plus en plus restreints .
Il est important de préciser l ‘intensité de cette dyspnée en faisant préciser au malade le type d’effort qui la fait apparaître : nombre d’étages, nombre de marches ou le nombre de mètres parcourus; parfois effort moindre : effort d’habillage. C’est la première manifestation de l’insuffisance ventilatoire.
* Selon le mode d’évolution : 
      – Dyspnée paroxystique  : crises de dyspnée durant de quelques minutes à quelques heures séparées par des intervalles de respiration normale : exemple : la crise d’asthme .
      – Dyspnée permanente : ou dyspnée de repos, apparaît au terme d’une période plus ou moins longue de dyspnée d’effort; elle se manifeste surtout dans le décubitus imposant parfois la position assise, buste vertical, qui la soulage : c’ est l’orthopnée.
* Selon la fréquence respiratoire  : 
       – Polypnée : lorsque la fréquence respiratoire augmente et devient supérieure à 22 mouvements/minute chez l’adulte et  à 30 mouvements/minute chez l ‘enfant  .
       – Bradypnée  : lorsque la  fréquence  respiratoire diminue respectivement au-dessous de 14 chez l’adulte et 22 chez l’enfant .
* Selon le temps respiratoire :
        – Bradypnée inspiratoire : se voit lorsqu’il y a un obstacle à la pénétration de l’air :
obstruction  laryngée par une inflammation du larynx (laryngite), par des fausses membranes (diphtérie laryngée ou croup) ou par un corps étranger.
Cette bradypnée inspiratoire est une dyspnée aiguë, elle s’accompagne souvent d’un cornage : bruit inspiratoire caractéristique  et d’un tirage qui réalise une dépression inspiratoire des parties molles : sus-sternale, sous-sternale et intercostale .
         – Bradypnée expiratoire : se voit lorsqu’il y a un obstacle à la sortie de l’air par atteinte diffuse des bronches de tous calibres, ce qui est réalisé dans la crise d’asthme  (où il y a broncho-constriction et  œdème  de la muqueuse bronchique). Cette bradypnée expiratoire est une dyspnée paroxystique, elle s’accompagne   de sifflements expiratoires : respiration sifflante entendue  à l’examen clinique du thorax , ce sont les râles sibilants et même parfois à distance.

5.  Les  fausses  dyspnées ou dyspnées sine materia, sans substratum anatomique, ne s’accompagnent pas de gêne respiratoire.
•  La  respiration  de Kussmaul  c’est une hyperventilation  réalisant une respiration lente , régulière et profonde,  égale aux deux temps qui sont séparés par une pause d’où le nom de respiration en  créneau. Elle  s’observe dans les états d’acidose métabolique diabétique ou rénale, elle est liée à la baisse des bicarbonates sanguins, d’où baisse du pH .
•  La  respiration périodique de Cheyne-Stokes : elle est le témoin d’un désordre nerveux central. C’est une irrégularité du rythme respiratoire qui se caractérise par des cycles respiratoires d’amplitude croissante devenant bruyants, puis d’amplitude décroissante aboutissant  à une pause complète de quelques secondes ou apnée.
Cette périodicité apparaît du fait de l’alternance de phases  d’hypercapnie et d’hypocapnie qui provoquent successivement une hyperventilation puis une  hypoventilation .
• La respiration périodique du syndrome de Pickwick  : est également une irrégularité du rythme respiratoire,   elle se voit chez certains obèses, elle est alors associée à une somnolence diurne. Cette respiration périodique s’observe la nuit, elle est faite de la succession de cycles caractérisés par une inspiration lente et  profonde, suivie de mouvements respiratoires courts et rapides et d’une apnée expiratoire complète .